Election des délégués du personnel : éclairage

L’élection des délégués du personnel intervient au terme d’un processus précis dont chaque étape est réglementée par le Code du travail.

  • Dans quel cadre l’élection doit-elle être organisée ?

L’élection des délégués du personnel doit avoir lieu au sein de l’entreprise ou de chaque établissement distinct, quand l’entreprise est divisée en établissements distincts.

Rappelons que l’établissement distinct permettant l’élection de délégués du personnel « se caractérise par le regroupement d’au moins 11 salariés constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres, susceptible de générer des réclamations communes et spécifiques et travaillant sous la direction d’un représentant de l’employeur, peu important que celui-ci ait le pouvoir de se prononcer sur ces réclamations » (cass. soc. 29 janvier 2003, n° 01-60628).

2.    Qui doit prendre l’initiative d’organiser les élections ?

Selon l’article L. 2314-2 du Code du travail, c’est à l’employeur de procéder à l’élection des délégués du personnel, et ce tous les 4 ans.

En outre, en l’absence de délégués du personnel et si une organisation syndicale ou un salarié en fait la demande, l’employeur est tenu d’organiser les élections dans le mois suivant la réception de cette demande (article L. 2314-4 du Code du travail).

  • Combien de délégués du personnel doivent-ils être élus ?

Le nombre de délégués du personnel à élire dépend du nombre de salariés dans l’entreprise (article R. 2314-1 du Code du travail) :

  • de 11 à 25 salariés : un titulaire et un suppléant ;
  • de 26 à 74 salariés : deux titulaires et deux suppléants ;
  • de 75 à 99 salariés : trois titulaires et trois suppléants ;
  • de 100 à 124 salariés : quatre titulaires et quatre suppléants ;
  • de 125 à 174 salariés : cinq titulaires et cinq suppléants ;
  • de 175 à 249 salariés : six titulaires et six suppléants ;
  • de 250 à 499 salariés : sept titulaires et sept suppléants ;
  • de 500 à 749 salariés : huit titulaires et huit suppléants ;
  • de 750 à 999 salariés : neuf titulaires et neuf suppléants ;
  • à partir de 1000 salariés : un titulaire et un suppléant par tranche supplémentaire de 250 salariés.

4.    Qu’est ce qu’une délégation unique du personnel ?

Dans les entreprises de moins de 200 salariés, le chef d’entreprise a la faculté de décider que les délégués du personnel constituent la délégation du personnel au comité d’entreprise (article L. 2326-1 du Code du travail).

Dans ce cas, les élus de la « délégation unique du personnel » exercent les attributions des délégués du personnel et des membres du comité d’entreprise.

En revanche, les deux instances restent distinctes.

En cas de délégation unique, le nombre de délégués du personnel à élire est fixé comme suit (article R. 2314-3 du Code du travail) :

  • de 50 à 74 salariés : 3 titulaires et 3 suppléants ;
  • de 75 à 99 salariés : 4 titulaires et 4 suppléants ;
  • de 100 à 124 salariés : 5 titulaires et 5 suppléants ;
  • de 125 à 149 salariés : 6 titulaires et 6 suppléants ;
  • de 150 à 174 salariés : 7 titulaires et 7 suppléants ;
  • de 175 à 199 salariés : 8 titulaires et 8 suppléants.

Ces effectifs s’apprécient dans le cadre de l’entreprise ou de chaque établissement distinct.

5.    Quelles formalités l’employeur doit-il accomplir ?

a)    L’information du personnel

Avant tout, l’employeur doit informer le personnel par voie d’affichage de l’organisation des élections, en indiquant la date envisagée pour le premier tour de ces élections (article L. 2314-2 du Code du travail).

Précisons que le premier tour doit se tenir au plus tard 45ème jour à compter de l’affichage.

b)   L’invitation des organisations syndicales

Concomitamment à l’affichage, l’employeur doit procéder à l’invitation des organisations syndicales.

D’une part, il doit inviter par lettre les organisations syndicales reconnues représentatives dans l’entreprise, celles ayant constitué une section syndicale dans l’entreprise, ainsi que des syndicats affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel.

D’autre part, il doit inviter par affichage les  organisations syndicales qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, légalement constituées depuis au moins deux ans et dont le champ professionnel et géographique couvre l’entreprise.

c)    La négociation du protocole d’accord préélectoral

L’objet du protocole d’accord préélectoral est de régler les modalités des élections avec les organisations syndicales.

A titre d’exemple, le protocole préélectoral régit la répartition du personnel dans les différents collèges électoraux, les modalités d’organisation et de déroulement des opérations électorales, le vote par correspondance, etc.

La validité du protocole d’accord préélectoral est subordonnée à sa signature par la majorité des organisations syndicales ayant participé à sa négociation, dont les organisations syndicales représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles ou, lorsque ces résultats ne sont pas disponibles, la majorité des organisations représentatives dans l’entreprise (article L. 2314-3-1 du Code du travail).

Précisons que si le protocole modifie le nombre et la composition des collèges, il doit être signé par toutes les organisations syndicales représentatives existant dans l’entreprise (article L. 2314-10 du Code du travail).

Si aucune organisation syndicale ne répond à l’invitation de l’employeur, ou si aucun accord n’est trouvé entre les partenaires sociaux, il appartient à l’employeur de déterminer les modalités des élections de manière unilatérale.

Toutefois, l’employeur doit obligatoirement saisir la direction du travail pour la répartition du personnel et des sièges.

d)   L’établissement des listes électorales

Cette formalité incombe à l’employeur, qui doit recenser les salariés appelés à élire les délégués du personnel.

A cet égard, sont électeurs les salariés des deux sexes âgés de 16 ans révolus, ayant travaillé trois mois au moins dans l’entreprise et n’ayant fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relative à leurs droits civiques.

Les salariés mis à disposition qui sont présents dans les locaux de l’entreprise et y travaillent depuis au moins un an sont électeurs s’ils remplissent une condition de présence de 12 mois continus dans l’entreprise utilisatrice.

Les salariés mis à disposition remplissant les conditions d’électorat dans l’entreprise utilisatrice et l’entreprise d’origine peuvent choisir s’ils exercent leur droit de vote dans l’une ou l’autre.

Par conséquent, l’employeur doit leur écrire suffisamment tôt pour qu’ils fassent part de leur choix.

Les listes électorales doivent être établies pour chaque collège (ouvriers et employés d’une part ; techniciens, agents de maîtrise, ingénieurs, cadres et assimilés d’autre part) (article L. 2314-8 du Code du travail).

Par exception, l’article L. 2314-9 du Code du travail dispose que si l’effectif est compris entre 11 et 25 salariés, il n’est constitué qu’un seul collège électoral.

L’employeur doit afficher les listes électorales au moins 4 jours avant la date des élections.

  • Quels sont les salariés éligibles ?

Selon l’article L. 2314-16 du Code du travail, sont éligibles les électeurs âgés de 18 ans révolus, et ayant travaillé dans l’entreprise depuis un an au moins, à l’exception des conjoint, partenaire d’un pacte civil de solidarité (PACS), concubin, ascendants, descendants, frères, sœurs et alliés au même degré de l’employeur.

Par ailleurs, les salariés travaillant à temps partiel simultanément dans plusieurs entreprises ne sont éligibles que dans l’une de ces entreprises et doivent choisir celle dans laquelle ils font acte de candidature.

Enfin, les salariés mis à disposition sont éligibles s’ils remplissent une condition de présence de 24 mois continus dans l’entreprise utilisatrice.

Ici encore, il est nécessaire d’écrire aux salariés mis à disposition remplissant les conditions d’électorat et d’éligibilité dans l’entreprise utilisatrice et l’entreprise d’origine pour qu’ils fassent part de leur choix.

  • Qui peut établir des listes de candidats ?

Au premier tour, seules les organisations syndicales sont admises à présenter des listes de candidats, tandis qu’au second tour, les candidats libres peuvent constituer des listes de candidatures.

Les listes doivent être établies séparément pour les titulaires et pour les suppléants, pour chaque collège (article L. 2314-21 du Code du travail).

Les listes des candidats ne peuvent être déposées qu’après la signature du protocole d’accord préélectoral et dans le délai qu’il fixe, étant précisé qu’à défaut d’accord, l’employeur peut fixer un délai de dépôt tenant compte des nécessités d’organisation du scrutin.

En tout état de cause, l’employeur doit afficher les listes des candidatures au moins 4 jours avant la date des élections.

  • Comment l’élection se déroule-t-elle matériellement ?

L’employeur a en charge l’organisation matérielle des élections (fourniture des bulletins de vote, des enveloppes, d’un ou de plusieurs isoloirs, etc.).

Il est impératif que les bulletins de vote soient distincts selon les collèges et selon le vote dont il s’agit (titulaires ou suppléants).

Par ailleurs, il est obligatoire d’organiser le vote par correspondance, si la convention collective ou le protocole d’accord préélectoral le prévoient.

En principe, le vote par correspondance est réservé aux salariés absents le jour du vote ou en déplacement professionnel ainsi qu’à ceux dont les horaires de travail ne leur permettent pas d’être présents au moment du vote.

  • Quelles sont les règles relatives au scrutin ?

L’élection intervient au terme d’un scrutin de liste à deux tours avec représentation proportionnelle à la plus forte moyenne (article L. 2314-24 du Code du travail).

Premier tour :

Au premier tour de scrutin, chaque liste est établie par les organisations syndicales, qui disposent d’un monopole de présentation des candidats (§ 7 ci-dessus).

Il convient de dépouiller tous les bulletins de vote, même si le quorum n’est pas atteint au premier tour. En effet, l’audience d’une organisation syndicale (déterminant sa représentativité), se mesure au moyen des suffrages exprimés au premier tour des élections professionnelles, quel que soit le nombre de votants.

Second tour :

Si le nombre des votants est inférieur à la moitié des électeurs inscrits, il est procédé, dans un délai de 15 jours, à un second tour de scrutin pour lequel les électeurs peuvent voter pour des listes autres que celles présentées par une organisation syndicale.

De même, un second tour doit être organisé lorsque les organisations syndicales n’ont pas présenté de candidats dans un ou plusieurs collèges.

Dans les deux cas, l’employeur doit informer les salariés de l’organisation d’un second tour de scrutin par voie d’affichage sur les lieux de travail.

  • Comment les résultats sont-ils proclamés ?

Il appartient au bureau de vote, dont la composition est fixée par le protocole d’accord préélectoral, de proclamer les résultats.

Ceux-ci sont constatés sur un procès-verbal de l’élection, établi et signé par tous les membres du bureau de vote, et affiché dans les lieux de travail.

Dans les 15 jours de l’élection, le procès verbal doit être transmis par l’employeur à l’inspection du travail, en double exemplaire (article R. 2314-25 du Code du travail), avec une fiche récapitulative de l’élection.

En cas de carence de candidatures aux deux tours, l’employeur doit, dans les 15 jours, transmettre à l’inspecteur du travail le procès-verbal de carence établi par le bureau de vote et l’afficher dans l’entreprise.

Enfin,  l’employeur doit adresser un exemplaire du procès-verbal de l’élection ou du procès-verbal de carence au Centre de Traitement des Elections Professionnelles à l’adresse suivante : CTEP – TSA 79104 – 76934 ROUEN CEDEX 9.

Me Xavier Berjot

Avocat Associé – Société d’Avocats JBV

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